Elles habitent à Mossoul (Irak), Raqqa ou encore Deir el-Zour (Syrie) et se sont confiées par téléphone et par Skype au journal "The Guardian". Elles révèlent leur quotidien dans ces villes sous l'emprise de l'État Islamique, entièrement contrôlé par la loi coranique, la "Charia", qui impose des règles strictes et révoltantes. Si elles ont provoqué l'indignation lors de leur mise en place, après les coups, les humiliations et les amendes, les femmes ont dû se résigner à respecter la loi de l'État Islamique.
Jamais seules
Impossible pour ces femmes de sortir non accompagnées. Un "mahram", une sorte de gardien masculin, doit constamment être présent à leurs côtés et peut être condamné à une amende ou des coups de fouet si la femme qu'il accompagne ne respecte pas les règles vestimentaires. "Il est interdit, pour une femme de Raqqa ou de Deir el-Zour, d'aller où que ce soit sans son mahram. Pour moi, c'est un gros problème puisque je n'en connais pas" explique Samar Maher, 20 ans et habitante de Raqqa (Syrie). La jeune étudiante a été contrainte de quitter l'Université d'Alep après avoir été arrêtée à plusieurs reprises par la "Hisbah" (police coranique), car elle n'avait pas l'autorisation de se rendre là-bas sans "mahram".
Les bus sont contrôlés pour vérifier que les femmes ne sortent pas sans "mahram". "Si une femme y est trouvée sans la tenue 'appropriée' ou sans son gardien, tous les passagers sont évacués et le véhicule ne peut poursuivre son trajet" explique Sama. Si à partir de 45 ans les femmes ne sont plus contraintes de respecter cette loi ainsi que le voile intégral, beaucoup de chauffeurs préfèrent ne pas prendre de risques et refusent de les accepter à bord du bus.
Prisonnières de leur voile
Soumises à un code vestimentaire très strict, les femmes résidant dans les villes sous l'Etat Islamique doivent dissimuler intégralement leurs formes avec un voile à double couche, une robe ample noire dessinée par l'EI appelée "abaya" et des gants noirs. Pour celles qui se risquent à ne pas respecter le règlement les punitions appliquées par la police coranique sont parfois violentes. "La Hisbah frappe sur la tête avec un bâton les femmes qui ne portent pas de voile intégral" raconte Maha Saleh, 36 ans.
Un "uniforme" inconfortable compte tenu de la chaleur et qui rend indissociable les femmes. "Ma femme et moi faisions du shopping dans le vieux souk lorsque je l'ai perdue de vue dans la foule. Le problème est que toutes les femmes portent des voiles identiques et c'était donc difficile de la reconnaître. J'étais tout à fait effrayé de commettre une erreur en me dirigeant vers la mauvaise femme. Cela aurait été un désastre de tomber entre les mains de la Hisbah. Je ne pouvais même pas utiliser mon GSM puisque le réseau était inaccessible" explique Sabah Nadiem habitant de Mossoul (Irak).
Pas de traitement de faveur non plus pour les femmes enceintes. "J'ai été choquée de voir que des femmes prêtes à accoucher se voyaient refuser l'entrée à l'hôpital, par la police religieuse, parce qu'elles ne portaient pas le voile en arrivant", raconte Salah.
A Mossoul (Irak) les petites filles doivent porter un voile laissant apparaître leur visage. En Syrie, les écolières ont l'obligation de revêtir la robe noire ample règlementaire à partir de leur troisième année d'école et de se voiler intégralement dès la quatrième année d'école.
Une coiffeuse condamnée à 1500 dollars d'amende et 10 coups de fouet
Samah Nasir, une coiffeuse de 43 ans a fait les frais de ces règles abusives. Directrice d'un salon de coiffure depuis 9 ans, elle a décidé d'aller à l'encontre de la loi en refusant de fermer son commerce. "Le juge a imposé que nous payions 1500 dollars et que je reçoive 10 coups de fouet sur le bout des pieds. Je n'avais jamais vécu une telle situation de toute ma vie"confie Samah.
Des règles inquiétantes et révoltantes qui dévoilent un quotidien sombre pour ces femmes sous l'Etat Islamique.
Par Camille Moreau
Source: MarieClaire.fr
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