Par Alfred Lela
Jozefina Topalli est une femme contestée, qui dégage autant de poigne que de grâce, mais qui a su s’imposer sur la scène politique albanaise. Membre du Parti démocratique de Sali Berisha, elle a été la première femme à assumer une haute fonction politique au sein de sa formation en devenant présidente du Parlement. Cette année, Albanie fête le centenaire de son indépendance, et l’élection d’une femme à la Présidence de la République serait un symbole très fort.
Les ambitions de Jozefina Topalli suscitent tout de même une série de questions. D’abord, ce symbole suffirait-il à faire oublier sa réputation, elle qui divise plutôt que fédère ? Mais surtout, pourquoi une femme dure et intelligente comme elle brigue la présidence, alors que cette fonction marque d’ordinaire la fin d’une carrière politique en Albanie ?
Historiquement, le PD n’a jamais vraiment eu de figure féminine emblématique. Il y a bien eu Rushen Golemi, une femme médecin, gracieuse et imposante qui au début des années 1990, quand le mouvement démocratique en était à ses balbutiements, côtoyait les figures charismatiques de la jeune démocratie albanaise. Elle semblait être là pour rappeler que les femmes y avaient aussi leur place, alors que la droite albanaise, dans une certaine posture conservatrice, semblait avoir relégué les femmes dans leurs foyers.
Issue d’une grande famille catholique de Shkodra victime des persécutions du régime d’Enver Hoxha, Jozefina Topalli, a fait de l’anticommunisme sa marque de fabrique. Marquée au fer rouge par son histoire familiale, elle a su plus que personne incarner ce discours au sein du PD. Lorsque le parti a repris le pouvoir en 2005, Sali Berisha, son mentor, a exploité un nouveau filon : les jeunes et les femmes.
Jozefina, qui tenait à occuper une place de choix, a obtenu la présidence du Parlement albanais. Aux dernières législatives, le PD a perdu sa bastion de Shkodra. Accéder à la Présidence de la république est un nouvel enjeu pour cette femme de tête qui compterait alors trois mandats successifs au sommet de l’État. Une ambition audacieuse.
Jozefina Topalli ne fait certainement pas l’unanimité. Mais en politique, c’est presque normal. De toute façon, si elle avait été professeure, activiste ou quoi que ce soit d’autre, ce n’aurait guère été différent. Les hommes n’aiment pas les femmes fortes ; les femmes pas plus d’ailleurs. Simone de Beauvoir disait en son temps : « on ne naît pas femme, on le devient ». Le fait que cette femme ne laisse personne de marbre en est la preuve.
Source: CourrierdesBalcans
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